vendredi 5 février 2010

Jour 15 à 20

Donc pour revenir sur cette semaine à l’encre, nous avons pu jouir d’une certaine liberté. J’ai pu, sans limite de temps, démêler ces cheveux depuis si longtemps mal traités! Quel défi! Pedro à sa montre m’affirme que cette opération m’aura coutée 2h45. Ajoutez à cela l’opération shampoing et nettoyage, j’ai du passé plus de 5 heures sur mon hygiène corporelle au cours du jour 17. Et tout cela pour comprendre que 30 minutes plus tard, j’avais l’impression d’être redevenue aussi sale qu’auparavant en vivant dans ces conditions.

J’ai adoré me retrouver sur le pont, j’y ai passé une journée entière à regarder chaque vague grossir sous mes yeux, se fracasser et s’évanouir dans le grand bleu. J’ai adoré chanter sur la Stern cabine, ipod à la main, écouteurs, tablettes chocolat. Durant des heures, j’ai regardé le temps passer. Je me suis amusée à évaluer la hauteur des vagues et m’imaginer des aventures hors du commun. Je me suis surprise de ne pas avoir rencontré la peur et ce même avec des éclairs dans le ciel. La confiance y était.

Cette semaine à l’encre m’a beaucoup apportée. Au bout du compte ce sera le moment au cours duquel je me serai sentie le plus isolée de ma vie, j’ai découvert tant de choses ici. Imaginez vous, sans connexion internet, sans téléphone satellite et plus d’ordinateur portable. Si cela vous arrivait chez vous et ce même avec le véhicule à quelques pieds de votre porte, la télévision et l’électricité, vous sentiriez l’isolement s’emparer de vous.

Il m’a alors fallut faire face à mon défi avec patience et réflexion. J’ai du mettre sur table mes sentiments pour trier le tout et tirer parti de la situation. Ce sera pour moi le moment le plus profitable de ma traversée jusqu’ici. J’ai longtemps réfléchi aux enfants de l’hôpital, à mes petits patients et à comment nos états se ressemblent. Comme eux, je me suis retrouvée, isolée, dans un monde où la survie est une bataille quotidienne, ou chacun de mes choix sont calculés dans le but de rendre mon quotidien plus vivable, moins amer… Je n’ai trouvé aucune position confortable pour reposer mon esprit, je n’ai dormis que lorsque l’espace et le temps me l’auront permis, j’ai été réveillé à maintes reprises par petites secousses, tel mes patients dans leurs petits lits qui font face à tant de piqures. La nausée était parfois de la partie, comme les enfants en traitements.

Mon monstre était le système de basse pression auquel on fessait face et duquel on était à la merci, la mer était son hôte et mon bateau ma prison. Mes petits héros font face à leurs montres de leurs lits à barreaux, l’hôpital en est l’arène et la bataille se fait dans sa plus pure expression. Comme eux, j’ai eu à choisir la bonne humeur, le sourire et la confrontation. J’ai choisi de soigner mes blessures et de me faire neuve jusqu’au prochain combat. J’avais parfois bien mal, j’avalais ma pilule. Comme eux, je mange et je maigris. Je subi ma peine dans l’incertitude absolue, dans parfois l’incompréhension, les hommes autour de moi parlent et je pose des questions comme les enfants en désir de comprendre ce qui leur arrive. Je perçois l’inquiétude et l’impatience dans les visages de mes coéquipiers sans toujours comprendre pourquoi il en est ainsi. La différence c’est que je connais la date probable de la fin du combat qui sera arrosé de joie et de moments merveilleux. Je sais que je vais me rendre de l’autre côté, mes petits anges sont souvent ignorants de l’issue de leur combat et resteront bien longtemps dans l’ignorance.

Si le cœur vous en dit, allez appuyer sur mon bouton Donnez à la droite sur mon site. La fondation CHU Sainte-Justine veillera à promouvoir la santé des enfants soignés chaque année dans l’établissement.

Merci

C’est une histoire à suivre…

1 commentaire:

  1. Magnifique texte! j'ai l'impression que cette pause forcée a provoqué une prise de conscience sur votre condition actuelle, condition pouvant être vécue de diverses façons.

    Nous sommes avec vous. Bien sûr que vous atteindrez votre destination et que vous fêterez.

    Pour l'instant, vous êtes en pleine aventure, parfois en pleine épreuve et nous, on se régale. Il y a une certaine injustice, la vie est ainsi faite.

    Nous vous embrassons, nous ramons avec vous.

    Accent Grave

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